Parmi les souvenirs de notre lointaine enfance, voici surgir les caravanes des Roms qui traversaient nos campagne et nos villages; les enfants sortaient comme des canetons des fermes et se groupaient au bord de la chaussée. C’était en effet un spectacle impayable que de voir défiler ces longs fourgons trainés par des chevaux à l’allure sauvage et puis ces femmes et ces enfants habillés d’une manière étrange et multicolore qui nous paraissait venir d’un univers mystérieux. Nous étions attirés par le spectacle mais en même temps, on était sur le qui-vive et aucun enfant n’aurait osé rester seul au bord de la route à contempler. Il aurait couru le risque de se faire enlever… c’est ainsi que nous menaçaient les adultes.
Ici dans la région du Guéra, nos nomades, Foulbé mais surtout Arabes, jouissent des mêmes jugements peu amènes de la part des sédentaires cultivateurs. Pourtant ils n’ont rien à voir avec les Roms d’Europe puisque ils sont tous éleveurs de petit bétail, de bovins ou de chameaux; d’une saison des pluies à l’autre, ils font le va-et-vient entre le désert et les savanes. C’est parce qu’ils ont la tendance à laisser entrer leurs troupeaux dans les champs que le gouvernement a crée des couloirs de transhumance en dehors desquels ils n’ont pas le droit de passage. Mais chaque matin de bonne heure leurs femmes vont dans les villages échanger les produits de leur troupeau avec les produits du sol et tout le monde y trouve son compte dans ce pacifique échange.